Le football rhénan est riche, sûrement un des plus riches d’Europe compte tenu des courtes distances qui séparent ses différents pôles. En plus de son opposition avec Mönchengladbach, Köln connaît quelques démêlés populaires avec sa voisine, Leverkusen, et son SV Bayer 04. Alors, authentique derby rhénan, petite bataille locale ou alors, de manière plus complexe, une grande incompréhension entre deux mondes et deux idées du football allemand que tout oppose ?
Article collaboratif rédigé par @KulturFCKöln.
🧪 Bayer Leverkusen : l’éternel mal-aimé ?
On rejoint Leverkusen depuis le centre de Köln de la manière la plus simple qui soit : en un petit tour en S-Bahn (RER). Pour qui n’est jamais venu dans le coin, Leverkusen est à Köln ce que Saint-Denis peut être à Paris ou Fos-sur-Mer à Marseille : sa grande voisine du nord, plus industrielle, sans remous. À Leverkusen, on va y travailler, bien que quelques-uns y vivent une vie tranquille et rangée. Mais si vous demandez à Google « que faire à Leverkusen » et vous ne trouverez quasiment rien. Tout se passe soit à Düsseldorf, soit à Köln.
Le Bayer 04 Leverkusen est une institution du football allemand. Installé depuis 40 ans au premier échelon, habitué au top 5 de Bundesliga et à l’Europe, pourvoyeur de grands noms du football allemand et de la Mannschaft, le SVB n’est pas n’importe quel club.
Mais voilà, dans un football allemand attaché à ses Traditionsvereine et à ses institutions, le Bayer Leverkusen, né en 1904, reste pour les supporters voisins, un intrus. Avec son palmarès, régulièrement moqué mais pas pour autant si infâmant ainsi que son héritage et sa culture de plus en plus espagnole du jeu. Car oui, le 14 avril 2024 est un jour de fête à Leverkusen, enfin champion d’Allemagne. Mais ailleurs, on savait déjà que le FC Bayern allait rapidement reprendre la main sur le championnat. Alors certes, le tableau est noircis : on a admiré la bande d’invincibles de Xabi Alonso, on a admiré l’explosion de Wirtz, on a apprécié ce 3-4-3 parfaitement huilé, ses côtés animés par Frimpong et Grimaldo. Comme on a suivi le Bayer de 2002, Ballack, Neuville, Butt ou Lucio, ces perdants magnifiques qui auraient pu changer le cours de l’histoire en remportant un triplé qui leur tendait les bras.
Le Bayer Leverkusen reste ce club structuré et solidement installé, historiquement lié au groupe pharmaceutique Bayer. Doté de moyens importants mais utilisé avec mesure, le projet porté par Fernando Carro et Simon Rolfes, ancien milieu et capitaine du club devenu directeur sportif en 2022 à la suite de Rudi Völler, correspond en tous points à ce que suivent et apprécient les observateurs du ballon rond : une politique de recrutement axée sur la détection et la valorisation de talents, un football proactif et offensif, et une vision sportive claire. Oui, mais voilà, c’est Leverkusen qui incarne aujourd’hui ce modèle. Dans un paysage du football allemand encore très attaché à ses grands clubs historiques, le Bayer 04 continue parfois d’être perçu différemment des institutions que sont le FC Bayern ou le Borussia Dortmund, pourtant confrontées aux mêmes exigences européennes et sportives. Il appartient, avec Wolfsburg, Hoffenheim ou le groupe RB, à cette catégorie de clubs souvent associés à des structures modernes et industrielles, dont la place dans le football allemand fait régulièrement débat.
Pour autant, le Bayer Leverkusen s’est imposé par la constance de son travail, la cohérence de son projet sportif et sa capacité à s’installer durablement au plus haut niveau. Un club qui assume son identité, son modèle et sa trajectoire, et qui a su, au fil des années, gagner une reconnaissance sportive bien au-delà de ses frontières régionales. Mais le Bayer sait ce qu’il vaut. Avec sa communauté de 25 000 membres et son aura glanée par son travail, sa constance et bien sûr ses moyens.
🐐 1.FC Köln : l’ancienne gloire fait de la résistance
« Uverall jitt et fans vom FC Kölle » (partout il y a des fans du FC Köln) chantent chaque week-end les 50 000 habitués du RheinEnergie Stadion. Le 1.FC Köln se targue fièrement d’être LE grand club rhénan. Son histoire est agitée. Premier champion de la Bundesliga moderne, il est depuis devenu l’autre champion d’Europe de la résilience. Seul le FC Metz pratique mieux que lui les montées-descentes depuis 1998. Mais ses affres sportives, ses échecs répétés, l’instabilité permanente, les ratés du mercato, l’absence d’Europe régulière et de titres majeurs n’ont en rien entamé la popularité ni l’aura du 1.FC Köln.
On dit de Köln qu’elle est une fête permanente, bruyante et autocentrée, fière d’elle-même, incomprise car incompréhensible, plus bordélique que la plupart de ses consœurs. Sympathique quoique fatigante par son goût d’elle-même, de sa tradition, de son carnaval, la quatrième ville allemande s’aime. Comme elle aime son Effzeh.
Passionnément. Ce club est à son image, il incarne mieux que quiconque la ville qui l’héberge. Le Effzeh a 160 000 membres mais Köln compte parmi son gros million d’habitants son club de football préféré, comme peu d’autres villes, y compris dans la bouillante Bundesliga.
Sûr de sa place dans le paysage rhénan, le Effzeh choisit ses rivalités. Son histoire et son aura lui permettent encore de se positionner comme un grand club, héritier d’un passé prestigieux. Face à Düsseldorf et son Fortuna, souvent éloignés de l’élite ces dernières années, le 1.FC Köln conserve un derby régional fort.
À l’échelle locale, le club domine naturellement les autres formations de la ville, le Fortuna Köln (D4) et le Viktoria Köln (3.Liga), dont les trajectoires sportives évoluent modestement à un autre niveau.
Surtout, Köln entretient avec le Borussia Mönchengladbach une rivalité historique et identitaire, marquée par l’héritage de figures comme Hennes Weisweiler (nous en reparlerons). Malgré des confrontations parfois douloureuses pour les supporters du Effzeh, le 1.FC Köln continue de se revendiquer comme l’un des clubs majeurs du Rhin, un statut qu’il estime légitime au regard de son histoire et de son ancrage populaire.
Mais le Bayer 04 Leverkusen représente une singularité dans l’environnement immédiat du 1.FC Köln. C’est le seul club voisin capable d’attirer des talents locaux, comme ce fut le cas avec Florian Wirtz, et de capter une partie de l’attention dans une zone traditionnellement acquise au Effzeh. C’est aussi le seul à s’inscrire dans une trajectoire sportive stable, là où d’autres clubs de la région ont connu davantage de cycles et de turbulences au fil des décennies.
Sans véritablement remettre en cause la position centrale du 1.FC Köln dans le paysage populaire rhénan, le Bayer Leverkusen s’est néanmoins imposé comme une réalité durable et incontournable. Pour Köln, il ne s’agit pas tant d’un rival historique que d’un voisin avec lequel la comparaison s’impose parfois.
🔥 Alors.. derby ?
Vous l’aurez compris, pour qu’un derby s’installe durablement, l’opposition ne suffit pas à elle seule : il faut aussi des racines communes, une histoire partagée et des références identitaires similaires. Köln et Düsseldorf se disputent depuis toujours le rôle de capitale du Rhin. Köln et Mönchengladbach partagent, eux, une tradition populaire et un héritage sportif profondément ancrés. Mais entre Köln et Leverkusen, les points de convergence restent limités. Les deux clubs poursuivent des objectifs différents, s’inscrivent dans des modèles distincts et ne se sont jamais réellement construits l’un par rapport à l’autre. Chacun revendique sa place et son importance, sans que cette relation ne se transforme en véritable rivalité assumée. Faute de grands matches fondateurs ou de confrontations décisives, cette rencontre reste avant tout une opposition régionale, plus qu’un derby au sens sportif du terme.
Leverkusen est plus puissant sportivement que Köln, et sera grand favori ce samedi. Le SVB, revigoré par l’arrivée de Kasper Hjulmand, a repris sa marche en avant en championnat, devrait assurer sa place dans les 24 en Ligue des Champions et s’avance comme prétendant à la Pokal après avoir écarté Dortmund chez lui. Face à lui, le Effzeh s’est essoufflé après un début de saison canon, et si son classement reste enviable (8e au coup d’envoi), sa dynamique s’est enrayée et se présentera affaibli par les blessures samedi soir.
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Crédit image : Lars Baron/Getty Images








